Cinéma

Naruto Shippûden la critique

Introduction et contexte

Créée par Masashi Kishimoto, Naruto Shippuden est la suite directe de la première série Naruto, elle-même un emblème du genre nekketsu. Publiée pour la première fois en 1999 dans le magazine Weekly Shonen Jump, l’œuvre s’inscrit dans la grande tradition des shonen axés sur la quête initiatique du héros. Alors que la première partie de Naruto pose les bases du parcours de Naruto Uzumaki, un jeune ninja rejeté par son village, Shippuden vient approfondir les enjeux émotionnels, philosophiques et stratégiques de cet univers.

Lorsque Naruto Shippuden débute en 2007, le monde de l’animation japonaise connaît une évolution marquée par la complexité narrative des shonen. Kishimoto, influencé par des auteurs comme Akira Toriyama (Dragon Ball) et Katsuhiro Otomo (Akira), aspire à transcender les attentes de son audience avec des personnages aux dilemmes moraux et des intrigues imbriquées. Dans ce contexte, Shippuden se concentre sur les enjeux globaux des guerres ninja, les luttes internes des personnages et le lourd héritage que Naruto porte en tant que réceptacle de Kyûbi, tout en s’appuyant sur le thème fondamental de l’amitié et de la rivalité entre Naruto et Sasuke.

Des influences variées : arts martiaux et films classiques

Outre Akira, Shippuden s’inspire également du cinéma d’arts martiaux. L’exemple de Rock Lee, l’un des personnages les plus attachants de l’œuvre, en est une parfaite illustration. Kishimoto a clairement évoqué l’influence de Jackie Chan dans le développement des techniques de combat de Lee. Sa maîtrise de l’ivresse, dans son combat contre Kimimaro, fait écho au célèbre film de Jackie Chan Drunken Master (Le Maître chinois), où le personnage principal utilise une forme d’art martial appelée Zui Quan, ou « boxe de l’homme ivre ». Cette technique, mélange d’acrobaties et de mouvements déséquilibrés, est parfaitement adaptée au style dynamique et inattendu de Lee, qui brille particulièrement dans cet affrontement.

Kishimoto s’inspire également du folklore japonais, notamment dans l’utilisation des démons à queues (bijû). Le mythe du renard à neuf queues (Kyûbi) est issu de la légende du kitsune, une créature mystique capable de se transformer et de tromper les humains. Cette légende est revisité de manière moderne dans Shippuden, où Naruto, en tant que réceptacle de Kyûbi, incarne à la fois la peur et l’espoir de son village.

Analyse des personnages et enjeux principaux

les personnages de Naruto shipudden

L’un des fils conducteurs de Naruto Shippuden repose sur l’évolution complexe de la relation entre Naruto et Sasuke, qui incarne la tension entre la résilience de Naruto et la quête de vengeance de Sasuke. Cette rivalité, introduite dès la première série Naruto, devient le moteur de la majorité des arcs principaux de Shippuden, notamment lors du passage de Sasuke à l’Akatsuki. Cependant, si cette dynamique est essentielle à la progression narrative, elle finit souvent par étouffer d’autres intrigues et personnages qui auraient pu enrichir l’œuvre.

Shikamaru : Un génie stratégique éclipsé par la quête de Naruto et Sasuke

Asuma Sarutobi et Shikamaru

L’arc de Shikamaru après la mort de son sensei, Asuma Sarutobi, est l’un des rares moments où un personnage secondaire prend réellement de l’importance. Cet arc, qui montre la quête de vengeance de Shikamaru contre Hidan, membre de l’Akatsuki, met en lumière son génie stratégique. L’affrontement dans la forêt, où il exploite chaque mouvement de Hidan pour l’amener à sa perte, est un exemple de sa maîtrise tactique. Cependant, après cet épisode, Shikamaru retombe rapidement dans l’ombre de Naruto et Sasuke, et son développement personnel, qui aurait pu donner lieu à des arcs plus longs, est interrompu. Son intelligence et sa maturité émotionnelle, démontrées dans sa réaction à la mort d’Asuma, auraient pu être davantage exploitées pour offrir une perspective différente dans l’univers chaotique de Shippuden.

Neji Hyûga : un héritage mal exploité

Neji, autre figure forte de la première série, subit un sort similaire. Portant sur ses épaules le drame de la division au sein du clan Hyûga, il représente un conflit interne fascinant. Cependant, dans Shippuden, ce développement est largement sous-exploité. Sa mort durant la Grande Guerre Ninja, bien que symbolique et poignante, semble précipitée et ne rend pas hommage à tout le potentiel de son personnage. Son sacrifice pour sauver Naruto et Hinata est certes fort en émotion, mais il manque un développement en amont qui aurait pu renforcer l’impact de cette perte. Le fait que Neji meure sans que sa relation avec le clan Hyûga ne soit pleinement explorée ou résolue laisse un sentiment d’inachevé.

Kakashi Hatake : un mentor sous-exploité

Kakashi, figure emblématique en tant que mentor de Naruto, Sasuke et Sakura, est un autre personnage dont le potentiel est sous-utilisé dans Shippuden. Bien que son arc personnel autour de la perte de ses amis (Rin et Obito) soit l’un des plus poignants de la série, son évolution en tant que sensei est souvent éclipsée par les enjeux liés à Naruto et Sasuke. L’introduction de Yamato aurait pu être une occasion de creuser plus profondément la dynamique entre Kakashi et ses élèves, mais cet aspect est souvent laissé de côté. L’utilisation de son Mangekyô Sharingan contre Deidara est impressionnante, mais le personnage de Kakashi méritait des interactions plus fréquentes et plus intenses avec ses élèves pour renforcer l’importance de son rôle dans leur formation.

Sakura Haruno : un développement inégal

Sakura, bien que mise en avant avec son apprentissage auprès de Tsunade et son rôle crucial dans le combat contre Sasori, n’échappe pas non plus à cette dynamique. Si son combat contre Sasori est l’un des moments forts de Shippuden, Sakura reste trop souvent une spectatrice des événements liés à Naruto et Sasuke. Sa tentative de tuer Sasuke, bien qu’un tournant majeur dans la série, manque de la profondeur émotionnelle nécessaire pour en faire un moment mémorable. Son rôle est régulièrement réduit à celui de soutien émotionnel, et ses propres ambitions ou conflits internes sont rarement mis en avant de manière significative.

Shino Aburame et Rock Lee : des talents éclipsés

rock lee

Shino Aburame, ninja mystérieux et redoutable grâce à ses techniques d’insectes, est l’un des personnages les plus oubliés de Shippuden. Dans la première série, il était présenté comme un personnage aux capacités fascinantes, mais dans Shippuden, il est presque totalement absent. C’est un immense gâchis, car les compétences uniques de Shino auraient pu apporter une diversité bienvenue aux combats souvent centrés sur les mêmes personnages.

De même, Rock Lee, symbole de la persévérance et de la ténacité, est également mis de côté. Bien que son combat contre Gaara dans la première série soit l’un des plus mémorables, son rôle dans Shippuden est minimal. Sa maîtrise des arts martiaux, qui le distingue des autres ninjas, aurait pu être mise en avant durant les affrontements de la Grande Guerre Ninja, mais là encore, son développement est sacrifié pour laisser place aux protagonistes principaux.

La Grande Guerre Ninja : une opportunité manquée

La Grande Guerre Ninja, qui aurait pu être l’occasion de mettre en avant l’ensemble des personnages secondaires, se concentre finalement presque exclusivement sur Naruto et Sasuke. Les arcs qui auraient pu se focaliser sur des personnages comme Neji, Rock Lee ou même Gaara sont relégués à des rôles mineurs. Cette guerre, bien qu’épique, manque de diversité dans le traitement de ses personnages, et la richesse du casting de Naruto en pâtit grandement.

Les moments forts et arcs mémorables

Cela étant dit, Naruto Shippuden parvient à offrir des arcs d’une intensité dramatique indéniable. L’arc de l’Invasion de Pain, qui culmine avec la destruction de Konoha et le sacrifice de Naruto pour sauver son village, est l’un des moments les plus mémorables de la série. Cet arc incarne parfaitement le dilemme moral du nekketsu : la confrontation entre un idéalisme presque naïf (Naruto) et un nihilisme désillusionné (Pain). En choisissant de pardonner à Nagato (alias Pain), Naruto transcende le cycle de la haine, un thème profondément enraciné dans les philosophies bouddhistes et shintoïstes qui influencent Masashi Kishimoto. La destruction complète de Konoha, suivie de la résurrection des habitants par Nagato, marque un des pics émotionnels de la série, montrant à quel point Naruto a mûri en tant que héros capable de vaincre sans utiliser la violence ultime.

Un autre arc marquant est celui de la Quatrième Grande Guerre Ninja, bien qu’il soit critiqué par certains pour sa longueur et son utilisation de « remplissage ». Cet arc met en scène la plus grande bataille de l’histoire du manga, impliquant toutes les nations ninja unies contre une menace commune. Il introduit des personnages clés comme Obito Uchiha et Madara Uchiha dans des rôles d’antagonistes majeurs, et explore les origines des Bijû (les créatures à queues) ainsi que la guerre des générations ninjas.

Parmi les arcs secondaires dignes de mention, il y a l’arc de l’Akatsuki Suppression, où l’on assiste à la chute de plusieurs membres emblématiques de l’Akatsuki, tels que Hidan et Kakuzu, face à l’alliance des ninjas de Konoha. Cet arc brille par la vengeance de Shikamaru contre Hidan, dans l’un des moments les plus stratégiques et émotionnellement chargés de la série, renforçant ainsi le développement de personnages secondaires qui avaient été un peu laissés de côté auparavant.

Il convient également de mentionner l’arc du Sauvetage de Gaara, qui débute la première partie de Shippuden en montrant les conséquences de l’Akatsuki qui capture Gaara, devenu Kazekage. Cet arc montre non seulement l’évolution de Naruto en tant que leader, mais aussi celle de Gaara, passant d’un ennemi redoutable à un allié respecté. La confrontation entre Deidara et Gaara, suivie du combat final avec Sasori, met en avant les capacités de Sakura et de la vieille Chiyo, qui jouent un rôle crucial dans la victoire contre l’un des ennemis les plus redoutables de l’Akatsuki.

Enfin, l’arc de Itachi et Sasuke, qui éclaire le passé tragique d’Itachi Uchiha et son sacrifice pour la paix de Konoha, est un autre moment clé de la série. Ce dévoilement bouleverse non seulement le personnage de Sasuke, mais aussi toute la perception du clan Uchiha. Le duel final entre les deux frères, suivi des révélations sur les réelles motivations d’Itachi, est un moment d’une grande intensité émotionnelle, modifiant profondément la trajectoire de Sasuke.

Ces arcs, bien que variés dans leur construction et leurs enjeux, apportent chacun des moments forts à la mythologie de Naruto Shippuden, et même si certains arcs comme celui de Kaguya peuvent être perçus comme une escalade narrative trop abrupte, ils ont néanmoins joué un rôle central dans l’évolution de l’univers et des personnages.

Conclusion

Naruto Shippuden est une œuvre marquée par la complexité de ses personnages et l’envergure de son récit, qui puise ses racines dans un riche éventail d’influences. Bien que la série ait été parfois critiquée pour sa focalisation sur la relation entre Naruto et Sasuke, au détriment de personnages « secondaires », elle demeure une référence incontournable du nekketsu. Son succès repose non seulement sur son action spectaculaire, mais aussi sur ses thèmes profonds d’amitié, de rédemption et de dépassement de soi.

Aujourd’hui, Naruto Shippuden continue d’influencer les nouvelles générations d’artistes et de scénaristes, tant dans les mangas que dans d’autres formes de médias, notamment les jeux vidéo et les films d’animation. Son héritage va bien au-delà de l’histoire d’un jeune ninja : il représente un miroir des luttes universelles que chacun peut rencontrer dans la quête de soi et des autres. C’est précisément cette combinaison d’action, de philosophie et d’émotion qui permet à Shippuden de perdurer et de résonner encore auprès des fans du monde entier, des années après sa conclusion.

Ce regard plus large sur l’héritage culturel et artistique de Naruto Shippuden le place comme une œuvre intemporelle, dont la profondeur et l’impact se feront sentir encore longtemps.

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